DEVOIR de MÉMOIRE

   Nguyễn Gia Tiến Lausanne, 25 avril 2005.

http://www.vnradionet.com/2005_19/d8_lo.mp3

Cette expression est utilisée d'habitude pour désigner l'obligation et la vive recommandation de ne pas oublier, en accord avec la conscience humaine, l'extermination de six millions de juifs victimes du nazisme pendant la seconde guerre mondiale. En effet, ce génocide est considéré comme un crime de l'humanité, dépassant tout entendement que les hommes ne pourront jamais oublier. Dans les manuels scolaires en Occident, cette tragédie est ainsi enseignée aux jeunes générations sous le nom de l'Holocauste ou de la Shoah.

Au mois de janvier de cette année, de nombreuses commémorations ont eu lieu à Auschwitz (Pologne) où plus d'un million de juifs ont trouvé la mort. De nombreuses délégations d'écoliers et étudiants ont ainsi visité ce sinistre camp de la mort avec ses terribles vestiges des fours crématoires et ses images des " mort-vivants " .

Pour justifier ce rappel de l'histoire, les occidentaux expliquent qu'au-delà de toute considération de vengeance ou de passé, il s'agit avant tout de préserver le présent et de consolider l'avenir. En effet, plus les futures générations auront pris conscience des dangers d'une idéologie sauvage et brutale et plus l'humanité saura éviter les dérapages amenant à une tragédie sans retour.

L'histoire du Vietnam est remplie de tragédies durant ces derniers cinquante ans. Et pourtant le devoir de mémoire ne semble pas encore trouver sa place dans la conscience collective des Vietnamiens. Au contraire, des slogans comme "oublions le passé pour se tourner résolument vers l'avenir" résonnent au sein de la diaspora d'outre-mer.

Depuis que Hô Chi Minh et le parti communiste, sous couvert de la lutte pour l'indépendance, ont introduit l'idéologie marxiste au Vietnam, le peuple vietnamien a connu les pires souffrances de la guerre civile. Dans son livre noir sur le communisme, Stéphane Courtois n'a-t-il pas démontré que les crimes des régimes communistes avec plus de 100 millions de victimes ont dépassé tout ce qu'on a pu voir sur le régime nazi de Hitler. Pol Pot au Cambodge, Mao en Chine, Staline en Union Soviétique, Hô Chi Minh au Vietnam n'ont-ils pas œuvré dans le même but d'exterminer des couches sociales de leur peuple ?

Revenons au Vietnam. En deux décennies, le régime communiste de Hanoi a provoqué deux sanglants exodes avec des centaines milliers de morts lors de la réforme agraire en 1956, de la prise de la ville de Huê en 1968 et de l'instauration des camps de rééducation après la chute de Saigon en 1975. Il a brutalement dispersé plus de 3 millions de Vietnamiens aux quatre coins du monde. Un jour, l'histoire de l'humanité nous apprendra peut-être encore plus sur l'ampleur des crimes de ce régime qui règne férocement, à ce jour, sur un pays sous-développé malgré son apparente ouverture touristique et économique.

Néanmoins, après les accords de Genève de 1954, il s'est trouvé au Sud-Vietnam des intellectuels "éclairés" et des représentants religieux pour parler de "pacifisme" et de "troisième voie". En oubliant les leçons du passé et leur devoir de mémoire, ils ont largement contribué à la victoire et à la mainmise de Hanoi en 1975.

Aujourd'hui, nous constatons les mêmes symptômes de l'oubli parmi la communauté vietnamienne réfugiée dans le monde. Pire encore, certains intellectuels et universitaires collaborent ouvertement avec Hanoi pour "réécrire" l'histoire de la diaspora vietnamienne réfugiée, et "effacer les stigmates du passé". En bref rendre une virginité au régime de Hanoi et tendre un piège dans lequel risque de tomber la jeunesse vietnamienne d'outre-mer sans expérience.

Rien ne peut nous garantir aujourd'hui que les terribles évènements de l'histoire du Vietnam ne pourraient pas se répéter avec un régime aussi cynique et vicieux que celui des despotes de Hanoi.

A la veille de l'anniversaire des 30 ans de la mainmise des communistes au Vietnam, il est vital de se demander si la communauté vietnamienne entretient à sa juste mesure le "devoir de mémoire" afin que ne se reproduisent plus jamais les tragédies de leur pays.

Nguyen Gia Tiên Lausanne, 25 avril 2005.