Deux guerres en 30 ans

La guerre d’indépendance (1946-1954)
La défense du Sud -Viêt Nam (1960-1975)

L’Occident a souvent une opinion fausse de l’histoire récente du Viêt Nam. On peut le comprendre, car tant que le régime communiste actuel à Hanoi est encore en place, ses forfaits ne seront jamais révélés. Pourrait-on connaître tous les crimes de Staline et la vérité sur l’URSS et l’Europe de l’Est, s’il n’y avait pas eu le processus de "déstalinisation" dès 1953 et la chute du Mur de Berlin en 1989? Et si les crimes du stalinisme ne sont maintenant que partiellement connus, les crimes perpétrés par Hanoi le sont encore moins. S’il y a eu un Nuremberg des Nazis, il manque encore un Nuremberg du stalinisme. Et à quand un Nuremberg de Hanoi?

En Occident, on veut faire croire, comme l’a fait d’ailleurs une émission récente de la BBC à l’occasion de l’anniversaire de la guerre franco-vietnamienne (19.12.1946), qu’il n’y a qu’une seule guerre de "libération" menée par les communistes, qui commence en 1946 et ne se termine qu’en 1975. En fait, c’est faux. Cette période de 1945-1975 comprend bien deux conflits de nature tout à fait différente: d’une part (1946-1954), la guerre anti-coloniale de tout le peuple, mais dont la victoire a été confisquée au profit de l’idéologie communiste, et d’autre part (1960-1975), la légitime défense du Sud Viêt Nam soutenu par les Etats-Unis contre la subversion du camp communiste.

Guerre d’indépendance 1946-1954 et victoire confisquée

La guerre franco-vietnamienne 1946-1954 était au début une lutte anti-coloniale pour l’indépendance, avec la participation des patriotes vietnamiens de tous bords. Sous la direction de Hô Chi Minh et son équipe, cette guerre a été orientée vers une guerre d’idéologie, servant la cause de l’Internationale communiste.

1945 fut l’année charnière de l’Histoire récente du Viêt Nam où le pays bascula dans un autre destin. La fin de la deuxième guerre mondiale avait précipité la chute des puissances coloniales européennes et japonaise dans le Sud-Est asiatique, déclenchant le soulèvement général du peuple vietnamien dont le patriotisme avait déjà été chauffé à blanc par les événements.Parmi les leaders révolutionnaires vietnamiens de l’époque, qui luttaient tous contre la tentative française de réoccupation de l’Indochine après la capitulation japonaise, se distinguait le groupe communiste dirigé par Hô Chi Minh, Vo Nguyên Giap, Pham Van Dông...Hô Chi Minh, agent du Komintern formé à Moscou, avait un objectif tout autre que l’indépendance nationale recherchée par les leaders nationalistes. Il visait la relève du Colonialisme français en Indochine par le Communisme et recevait des directives précises venues de Moscou.

On comprend pourquoi les communistes vietnamiens étaient mieux organisés, homogènes, et rompus aux manoeuvres politiques machiavéliques. Un premier gouvernement de coalition (entre nationalistes et communistes) du Viêt Nam indépendant avait été formé en 1945 avec Hô Chi Minh en tête, mais n’avait pas duré longtemps.

Le conflit entre nationalistes et communistes, latent depuis les années 1930, éclata en 1946 quand Hô Chi Minh, soucieux d’en finir avec l’opposition nationaliste, manoeuvra à signer séparément avec les Français l’accord du 6 mars 1946, permettant le débarquement des troupes de Leclerc à Hai Phong pour relever les troupes nationalistes chinoises de Tchiang Kai-chek (chargées par les Alliés de désarmer les Japonais au Nord du 16ème parallèle). Cette manoeuvre avait permis aux communistes d’isoler et d’affaiblir totalement les partis nationalistes: le Quôc Dân Dang (de Nguyên Tuong Tam), le Dông Minh Hôi (de Nguyên Hai Thân), les Dai Viêt, etc...Vo Nguyên Giap avait pu ainsi perpétrer impunément des massacres contre les nationalistes à Hanoi en 1946.

Les affaires des rues Ôn Nhu Hâu, Quan Thanh... sont encore dans toutes les mémoires. Pour le grand public, au début Hô et Giap avaient toujours soigneusement dissimulé leur identité communiste, et leur Front Viêt-Minh a pu ainsi rassembler le plus grand nombre de patriotes de l’époque où le communisme était encore peu connu dans les esprits.

La cause déclenchante de la guerre franco - vietnamienne qui éclata le soir du 19 décembre 1946 fut l’indignation générale débordée de la population face aux provocations répétées des troupes françaises à Hanoi.
Cette guerre n’avait jamais été souhaitée par le groupe Hô-Giap qui voulait amadouer les Français pour calmer le jeu, afin d’avoir les mains libres pour l’extermination de l’opposition nationaliste. Pourtant la résistance armée qui s’ensuivit avait fourni encore de meilleures occasions aux communistes pour liquider tranquillement toutes les factions non communistes de la résistance pendant la guerre.

On voit ainsi, au début de la guerre, que la vraie force qui faisait l’élan de la lutte anti-coloniale soutenue par le peuple entier était le patriotisme vietnamien, qui n’avait rien à voir avec le communisme. Dès 1949 avec l’arrivée au pouvoir des communistes en Chine, Hô et son équipe avaient désormais le soutien direct de ces derniers. Forts de cet appui, ils commencèrent à dévoiler leur visage communiste.

Par sa totale soumission à Pékin, Hô Chi Minh avait obtenu en échange, à la bataille de Diên Biên Phu, la participation directe au commandement de Giap des communistes chinois (les généraux Vi Quôc Thanh, La Qui Ba, Trân Canh...et leurs dizaines de milliers de "volontaires"). Cela avait permis à Giap de remporter la victoire en 1954 et d’ouvrir la voie à l’installation d’une "dictature du prolétariat" calquée sur le modèle de Pékin. Ce n’est pas par hasard qu’on vit ainsi au Nord, après la prise totale du pouvoir par Hô Chi Minh, la mise en oeuvre, sur l’ordre de Mao, de la sanglante "Réforme agraire" (1953-1956), véritable génocide à la manière de Pol Pot durant lequel plusieurs centaines de milliers de personnes périrent. L’équipe de Hô Chi Minh avait ainsi pratiquement transformé la guerre d’indépendance nationale contre le colonialisme français en un conflit idéologique, la "lutte des classes", au service de l’Internationale communiste.

Toutes ces pertes de vies humaines, de temps et la destruction du pays, ne servaient qu’à faire le passage du colonialisme "blanc" au colonialisme "rouge" au Nord Viêt Nam. La preuve fut l’exode massif en 1954, après les accords de Genève, d’un million de personnes du Nord au Sud, (on aurait dit que ces gens "votaient avec leurs pieds") fuyant le communisme, et l’installation dans le Nord d’un régime stalinien sans scrupules qui est resté en place jusqu’à ce jour.

La légitime défense du Sud -Viêt Nam trahie et échouée (1960-1975)

La vocation communiste de Hô Chi Minh et de son équipe ne leur avait pas permis de s’arrêter au Nord Viêt Nam, car les directives de l’Internationale communiste étaient précises: il fallait encore aller plus loin dans le Sud-Est asiatique.

vn3.gif

Suite aux accords de Genève de 1954 (sans la signature du gouvernement de Bao Dai et des Etats-Unis) signés entre Hô Chi Minh et les Français, et à la partition du Viêt Nam au 17ème parallèle, les deux Viêt Nams se trouvaient dans les deux blocs antagonistes durant la guerre froide.
Au Sud-Viêt Nam, après Bao Dai, se succédaient le gouvernement de Ngô Dinh Diêm et ceux des militaires (Nguyên Van Thiêu en dernier lieu). Avec un minimum de soutien américain, ces gouvernements étaient arrivés à contenir pendant un premier temps les sabotages et l’infiltration des communistes depuis le Nord.

Le peuple sud-vietnamien, malgré une démocratie encore imparfaite, jouissait quand même pendant cette période d’une relative liberté, beaucoup plus satisfaisante que ce qui s’est passé dans le Nord sous le régime stalinien de Hô Chi Minh.

Dès 1960, avec l’aide du bloc communiste, la guerilla s’intensifiait dans le Sud. En 1965, d’énormes caches d’armes venues directement de la Chine communiste furent découvertes dans le Sud, notamment des fusils Kalashnikov (très modernes à l’époque) près de Vung Rô (Nha Trang). Déjà à cette époque de 1965, les combats faisaient rage partout, et le Sud-Viêt Nam faillit sombrer à cause de la subversion communiste.

On assistait au même scénario bien connu du type de "guerres de libération" qui s’était déroulé plusieurs fois ailleurs dans le monde. Il s’agissait en fait dans chaque cas d’une subversion communiste camouflée. C’est alors seulement que les Marines américains débarquèrent sur la plage de Da Nang en 1965, prélude à une intervention plus massive des Etats-Unis, intervention qui s’adaptait chaque fois à une escalade de l’agression venant du bloc communiste. L’intervention des Américains n’était donc qu’une réponse nécessaire à la stratégie de subversion du camp communiste. La vraie nature de la guerre 1960-1975 était une défense du peuple sud-vietnamien, avec le soutien des Etats-Unis, contre l’agression du bloc communiste. Il s’agissait en fait d’une lutte pour préserver la liberté du Sud-Viêt Nam contre la tentative d’imposer une dictature communiste. Mais la politique interne américaine, son influence sur la conduite de cette guerre, et les raisons du retrait des Américains du Viêt Nam en 1975 sont encore une autre histoire.

Pourtant, l’effondrement rapide de Saigon en 1975 ne peut pas s’expliquer par le manque de motivation du peuple sud-vietnamien à défendre sa liberté, ni par la faiblesse de son armée. Car celle ci, en 1972, quand elle avait été normalement ravitaillée par les Etats-Unis, avait courageusement combattu et mis en pièces les divisions blindées de Giap franchissant la zone démilitarisée dans une offensive d’envergure beaucoup plus importante que celle de 1975.

 vn10.gif

Malheureusement, tandis que le bloc communiste continuait son soutien sans réserve aux agresseurs nord-vietnamiens, on a vu, pendant les deux dernières années de guerre (1973-1974), un défaitiste Congrès américain, pour des raisons politiques démagogiques et à courtes vues, effectuer d’importantes coupes de vivres et de munitions à l’encontre du Sud-Viêt Nam. Cette trahison a été parfaitement orchestrée et précédée par une campagne de dénigrement et de désinformation en faveur des communistes, menée à l’époque par la majorité des médias et de l’intelligentsia occidentaux.

("Tiêng Viêt", Revue de l'Association des Vietnamiens de Lausanne)

 


Un pays entier transformé en prison

Après la chute de Saigon en avril 1975, le Nord Viêt Nam, victorieux, ferme le pays et impose rapidement son régime policier au Sud: dissolution de l’administration et instauration du socialisme bureaucratique, enfermement dans des "camps de rééducation" des anciens fonctionnaires, de l’élite du Sud (intellectuels, écrivains, artistes ...) et de leurs familles. Beaucoup mourront dans ces goulags.

vn11.gif Nombreux sont ceux qui fuient alors le pays. C’est le début de la tragique histoire de ces boat people qui s’embarquent sur des rafiots pourris en direction de Hong Kong, de la Thaïlande, de la Malaisie et des Philippines. Plus d’un million de personnes prennent le chemin de l’exil et beaucoup périssent en mer.
L’engagement du Viêt Nam contre le régime de Pol Pot et l’invasion du Cambodge en 1979 provoquent les foudres de la Chine. Le Viêt Nam mobilise une énergie et des moyens importants dans ces guerres. Pendant dix ans, le Viêt Nam occupe le Cambodge, suscitant l’hostilité de la population. Lorsque les soldats de Hanoi évacuent le Cambodge, le Viêt Nam se retrouve en paix, pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale.

Face aux difficultés économiques croissantes, le régime se transforme, en suivant l’exemple soviétique de la glasnost et de la perestroïka. Lentement, les frontières s’ouvrent aux touristes et hommes d’affaires étrangers, les réformes économiques s’accélèrent, la liberté de parole et de comportement est tolérée, mais sous la surveillance d’une police omniprésente et corrompue.

Aujourd’hui, de nombreuses difficultés subsistent encore, notamment en matière de malnutrition, de surpopulation et de démocratie, mais le Viêt Nam a commencé sa reconstruction. Peu à peu, les embargos des pays européens et des Etats-Unis se sont levés.

Cependant, les cadres communistes continuent de se livrer à un pillage systématique des richesses du pays, s’approprient les biens du peuple et pratiquent des exactions vexatoires à l’encontre des entreprises étrangères qui viennent investir au Viêt Nam à leur invitation. Le rêve des communistes de transformer le Viêt Nam en un petit dragon s’éloigne de jour en jour. Les caisses de l’Etat sont vides, les dettes dues à l’étranger s’amoncellent, et rien ne marche actuellement dans ce pays.